Sous-marin Q135 DORIS de 600 tonnes de moyenne patrouille à double coque de la classe CircéLe sous-marin Q135 Doris de 600 tonnes de la classe Circé affectée à la 13e DSM


Membres de l'association qui ont embarqué sur la Doris


Le 19 avril 1940, les sous-marins Q135-DORIS (classe CIRCÉ de 600 tonnes) de la 13e DSM et Q136-ORPHÉE (Classe DIANE de 630 tonnes) de la 16e DSM appareillent pour une première mission de surveillance devant Helgoland, une île au sud-est de la mer du nord, abritant une base sous-marine allemande. Mais ils doivent abréger leurs patrouilles, la DORIS, ayant une avarie sur le compresseur de son moteur bâbord et l'ORPHÉE un problème sur l'un de ses moteurs électriques.

Extrait de l'allocution prononcée le 16 juillet 2004 par le Capitaine de Vaisseau Jacques Favreul, fils aîné de Jean Favreul, commandant la DORIS relatant la suspicion de sabotages sur les quatre sous-marins de la 13e division.

"Ne pouvant ici revenir dans le détail sur les incidents qui ont affecté nos sous-marins côtiers opérant loin de leur base, je me contenterai de rappeler que, suspectant des sabotages, l’amiral de la Flotte avait demandé qu’une enquête soit effectuée dans le port de Toulon où les quatre sous-marins de la 13e division avaient subi jusqu’en fin 1939 dans l’arsenal leurs grandes réparations. En effet, depuis leur départ de ce port et au cours de leurs patrouilles en mer du Nord, ces sous-marins avaient eu de nombreuses et anormales défaillances de leurs équipements vitaux, spécialement la Doris qui dût prématurément revenir de sa 1ère patrouille avec le compresseur de l’un de ses deux moteurs en avarie. Faute de pouvoir obtenir de la Métropole un équipement de rechange, cette avarie ne put jamais être réparée et la solution de fortune conseillée à distance par les arsenaux français s’était révélée inapplicable".

Le 7 mai 1940, devant l’imminence de l’invasion de la Hollande par les troupes terrestres allemandes et d’un débarquement par la côte, la DORIS, bien qu'ayant toujours le compresseur de son moteur bâbord en avarie, reçoit l’ordre d’appareiller avec le sous-marin Q161-AMAZONE (Classe DIANE de 630 tonnes) de la 16e DSM, accompagné du sous-marin britannique HMS 54S SHARK (classe "S" de 840 tonnes - Groupe 2 Sous-classe SHARK), pour patrouiller devant la côte hollandaise dans une zone où opèrent d’autres bâtiments français et britanniques.

Secteurs de patrouille de la DORIS et de l'AMAZONE

Dans la nuit du 8 au 9 mai la mer est belle et éclairée par la lune. La DORIS en route en surface recharge probablement ses batteries.

À 23h18, l'équipe de quart à la passerelle de l’AMAZONE qui patrouille aussi en surface dans un secteur contigu à celui de la DORIS, observe dans son secteur une première explosion suivie d'une seconde une dizaine de minutes plus tard. Aucun message de détresse n'est intercepté, aucune embarcation de sauvetage n'est aperçue. La DORIS ne répondra plus aux messages et sera considérée comme perdues corps et biens le 15 mai 1940. Que s'est-il passé ? La DORIS a-t-elle heurté une mine ? a-t-elle était victime d'un torpillage ? Ce jour là, aucun indice ne permet de vérifier ces hypothèses.

L'U9 du capitaine Lüth qui coula la DORIS

Bien après la fin de la seconde guerre mondiale, la vérité sur la disparition de la DORIS est révélée dans un rapport découvert dans les archives de la Kriegsmarine qui, sur ordre de l’Amiral Dönitz, avaient été préservées pour attester de la régularité des actions des U-Boote. Ce rapport rédigé par le le capitaine Lüth, commandant le sous-marin U-9, un U-boot type IIB, relate le torpillage d’un sous-marin dans la nuit du 8 au 9 mai 1940 à une position correspondant au secteur de patrouille de la DORIS. Il ne pouvait donc s’agir que de la DORIS, seul submersible disparu à cet endroit à cette date.

Alors qu'il patrouille l'U-9 détecte un sous-marin en surface éclairé par la lune. Après s’être assuré qu’il ne s’agissait pas de l’un des siens, notamment par comparaison de la taille et de la forme du kiosque qui ne ressemblait en rien à celle d'un U-Boot. L’U-9 prend en chasse son adversaire. Au début de l'attaque, l’équipage de la DORIS ne semble pas s’être aperçu de la présence de l’U-Boot, mais après quelques instants, le submersible français force l’allure, ce qui semble prouver qu’il avait vu ou entendu le sous-marin Allemand.

Avec son moteur bâbord défectueux qui ne lui permet pas d'atteindre sa vitesse maximale, la DORIS n'arrive pas à distancer son poursuivant. Elle change plusieurs fois de cap pour essayer de d'échapper au sous-marin allemand, mais aussi pour éviter l'ajustement d'un lancement de torpille, mais en vain. Le capitaine Lüth ordonne le lancement d’une première torpille G7E à moteur électrique réglée à 2 mètres d’immersion puis d’une seconde torpille G7A à moteur à air comprimé, réglée à 3 mètres d’immersion, pour un but distant de 700 mètres.

La torpille G7A atteint la DORIS 52 secondes après son lancement, ce qui équivaut à un parcours de 780m. Une très forte explosion est entendue suivie d'une colonne de feu et de fumée. La torpille à vraisemblablement atteint la DORIS au niveau des soutes à gas-oil, d’où l’ampleur de l’explosion. La torpille G7E qui a manquée sa cible, explose 10 minutes plus tard, après être arrivée en fin d'autonomie.

La DORIS sombre en quelques minutes emportant avec elle ses 45 membres d'équipage : 4 officiers, dont le commandant, 9 officiers-mariniers, 15 quartiers-maîtres, 14 matelots et 3 marins de l’équipe de liaison de la Royal Navy, dont un officier. Après avoir constaté la présence d’une grande nappe d’huile et l’absence de survivants en surface, l’U-9 remet en route et poursuit sa mission.

L'épave de la DORIS restera introuvable pendant de longues années et ne sera découverte qu'en 2003 par des plongeurs Néerlandais.


 


Les 45 membres d'équipage de la Doris le 8 mai 1940


FAVREUL Jean Ernest Marie Capitaine de Corvette Commandant
LADONNE Maxime Erasme Pierre Lieutenant de Vaisseau Officier en second
DE DIEULEVEULT Jacques Arthur Marie Émile Enseigne de Vaisseau Officier en troisième
ROCHE Lucien Casimir Eugène Enseigne de Vaisseau Officier en quatrième
LE SCELLER Maurice Joseph Premier-Maître mécanicien  
GAUDU Emile Premier-Maître timonier  
PERACHON Marcel Joannès Maître électricien  
LE PHILIPPE Emile Marie Maître mécanicien  
BARVEC François Louis Maître torpilleur  
POTARD Jean Marie Second-Maître électricien  
BRESSOT Jean Marie Second-Maître mécanicien  
REBOUTÉ Georges Raymond Second-Maître mécanicien  
MADEC COUSIN Jean Yves Second-Maître radio  
FITAMANT Jean Marie Quartier-Maître Canonnier  
CLOATRE Claude Louis Marie Quartier-Maître électricien  
GALLINEAU Joseph Quartier-Maître électricien  
GOURTAY Jean Guillaume Quartier-Maître électricien  
BURR Joseph Quartier-Maître fusilier  
BETAILLE Marcel Quartier-Maître mécanicien  
BRES Louis Elie Emile Quartier-Maître mécanicien  
CICCHI René Henri Quartier-Maître mécanicien  
MENGUY Marcel Théodore Quartier-Maître mécanicien  
MURACCIOLE Pierre François Quartier-Maître mécanicien  
REVERSO Marcel Joseph Quartier-Maître mécanicien  
VALETTE Robert Alban Henri Quartier-Maître radio  
MAISSA Jean Quartier-Maître radiotéléphoniste  
KRAEMER Helmut Quartier-Maître timonier  
CABON Michel Joseph Marie Quartier-Maître torpilleur  
CHEVALIER Edmond Bernard Raymond Matelot cuisinier  
GAUTHIER Louis Honoré Matelot cuisinier  
BOVERY Georges Joseph Matelot électricien  
HUGOT Jean Victor Matelot électricien  
KAUFFMANN René Laurent Matelot électricien  
DUCROCQ Edouard Jean Matelot maître d'hôtel  
CHABAUD Georges Adolphe Matelot mécanicien  
LUSTIG Marcel Matelot mécanicien  
MATHIOT Jacques René Edouard Matelot mécanicien  
BORDET Jean Louis Henri Matelot timonier  
ANDRÉ Joseph Matelot torpilleur  
AZEMAR Guy Antoine Matelot torpilleur  
MARCHOIS Paul Ernest Matelot torpilleur  
REGNIER Charles Abel Matelot  
WESTMACOTT Richard Evelyn Lieutenant Royal Navy
WILSON Harry Yeoman of signals Royal Navy
SALES Charles Telegraphist Royal Navy

Une partie de l'équipage de la DORIS quelques jours avant a disparition